ERRATUM
Mea culpa, le diable se cache dans les ordres de grandeur ! En préparant un live concernant ce cas client, nous nous sommes rendu compte qu’une erreur s’était glissée dans le calcul du bilan carbone emailing de Mediapart.
Une erreur bête mais méchante ! Le format des cellules de notre feuille de calcul a sauté : nous avions renseigné des valeurs comme 76%, mais c’est 76 qui a été pris en compte. Vous voyez ce genre d’erreur bête mais qui fait mal puisqu’elle change drastiquement le résultat final. Nous passons de 244 tonnes de CO2e à 10,5 tonnes de CO2e. Méchante l’erreur.
Les boulets ! Ils ne s’en sont pas rendu compte !? Malheureusement non… Cela montre que même si nous avons le nez dedans au quotidien, les ordres de grandeur des émissions carbone restent compliqués à appréhender. Nous avons mis à jour l’article ci-dessous avec les bonnes valeurs. Nous avons vérifié maintes et maintes fois avec Alexis. La méthodologie a été rectifiée, elle est maintenant plus fiable. Les conclusions de cet article restent inchangées. C’est bien ça le principal !
Lors d’un audit emailing réalisé pour notre client Mediapart, nous avons calculé le bilan carbone émis par la totalité des newsletters et emailing envoyés sur 2022. Au total, Mediapart a envoyé 144 millions d’emails pour un total de 10,5 tonnes de CO2e. Badsender et SAMI détaillent dans cet article comment calculer l’impact carbone d’une activité emailing.
Depuis 2021, nous passons par la plateforme carbone SAMI pour calculer le bilan carbone de Badsender (le dernier en date est ici). Dans notre bilan, nous calculons l’impact carbone de notre modeste activité emailing. Il est assez anecdotique : au total en 2022, nous avons envoyé 71 620 emails pour un impact carbone de 5,32 kg de CO2e.
Mais qu’en est-il d’une entreprise qui envoie plusieurs centaines de millions de newsletters par an ?
Quels critères prendre en compte pour calculer l’impact carbone d’une activité emailing ?
Pour le calcul, nous avons besoin des critères suivants :
- Le nombre d’emails délivrés
- La localisation des serveurs d’envoi
- Le taux d’ouvertures cumulées
- Le poids des emails envoyés
- Le temps de lecture des emails
- La répartition des terminaux utilisés de lecture : desktop, smartphone, tablette
- La répartition des modes de consultation : 4G, WIFI
- Pays où sont localisés les lecteurs et la répartition des lecteurs par pays
Et si vous allez jusqu’au bout de cet article, vous verrez qu’il y a d‘autres critères à prendre en compte pour calculer l’impact carbone de votre ombre climatique (un concept clé pour évaluer les conséquences du contenu de vos messages).
Concrètement comment récupérer ces infos ?
Prenons un exemple concret avec un de nos clients Mediapart, dans le secteur de la presse indépendante.
Le nombre d’emails délivrés et le nombre d’ouvertures cumulées
Ça, c’est facile ! Depuis l’outil de routage, il est possible de récupérer facilement les infos suivantes :
Typologie de campagnes | Nombre d’emails délivrés | % d’ouvertures cumulées |
---|---|---|
EDITORIAL | 120 402 442 | 61% |
MARKETING | 23 133 321 | 55% |
TRANSACTIONNEL | 247 904 | 144,00% |
TRIGGER | 1 072 373 | 75,24% |
Total général | 144 856 040 |
J’entends d’ici vos questions 😉 L’outil de routage du client en question n’exclut pas les ouvertures provenant d’AMPP (Apple Mail Privacy Protection).
La localisation des serveurs
Facile.
Vous le trouverez dans votre contrat qui vous lie à votre outil de routage. Pour Mediapart, c’est la Belgique.
Le poids des emails
Approximativement faisable.
Il faut donc récupérer le poids de chaque campagne. Idéalement j’ai besoin du poids de l’email une fois envoyé (donc poids du html avec l’ajout des liens de tracking du routeur + poids des images). Information qui n’est pas disponible facilement dans les rapports statistiques des outils de routage (Coucou les routeurs ! Faites évoluer vos tableaux de bord please !)
Ici, nous avons téléchargé (un peu au hasard) un email de chaque typologie de campagne.
Typologie de campagnes | Nombre d’emails délivrés | % d’ouvertures cumulées | Poids de l’email en Mo |
---|---|---|---|
EDITORIAL | 120 402 442 | 61% | 1,68 |
MARKETING | 23 133 321 | 55% | 0,866 |
TRANSACTIONNEL | 247 904 | 144,00% | 0,0243 |
TRIGGER | 1 072 373 | 75,24% | 0,0811 |
Total général | 144 856 040 |
Le temps de lecture des emails
À la louche.
Quand nous mesurons les environnements d’ouvertures d’emails de nos clients, nous utilisons l’outil Litmus. Sur cet outil, nous avons également le temps de lecture des emails. Nous avons fait le test sur une newsletter et ça a donné le résultat suivant :
Email20230220 | |
---|---|
Read : +9 secondes | 43,9% |
Skim Read : 2-8 secondes | 24% |
Glanced : -2 secondes | 32,1% |
Nous sommes partis sur 10 secondes (soit 0,16 min).
Typologie de campagnes | Nombre d’emails délivrés | % d’ouvertures cumulées | Poids de l’email en Mo | Temps de lecture en min |
---|---|---|---|---|
EDITORIAL | 120 402 442 | 61% | 1,68 | 0,16 |
MARKETING | 23 133 321 | 55% | 0,866 | 0,16 |
TRANSACTIONNEL | 247 904 | 144,00% | 0,0243 | 0,16 |
TRIGGER | 1 072 373 | 75,24% | 0,0811 | 0,16 |
Total général | 144 856 040 |
La répartition des terminaux utilisés pour la lecture : desktop, smartphone, tablette
(Presque) Facile . Dans l’outil de routage.
Maintenant presque tous les routeurs disposent de ces informations dans leurs tableaux de bord.
Typologie de campagnes | Nombre d’emails délivrés | % d’ouvertures cumulées | Poids de l’email en Mo | Temps de lecture | % lecture sur smartphone | % lecture sur desktop | % lecture sur tablette |
---|---|---|---|---|---|---|---|
EDITORIAL | 120 402 442 | 61% | 1,68 | 0,16 | 17% | 76% | 2% |
MARKETING | 23 133 321 | 55% | 0,866 | 0,16 | 17% | 76% | 2% |
TRANSACTIONNEL | 247 904 | 144,00% | 0,0243 | 0,16 | 17% | 76% | 2% |
TRIGGER | 1 072 373 | 75,24% | 0,0811 | 0,16 | 18% | 76% | 1% |
Total général | 144 856 040 |
Néanmoins, vous constaterez que la somme des supports : % de lecture sur smartphone + % de lecture sur desktop + % de lecture sur tablette, ne fait pas 100%… Le routeur n’a certainement pas su ventiler les informations dans les 3 catégories.
Nous sommes donc partis sur la ventilation suivante :
Typologie de campagnes | Nombre d’emails délivrés | % d’ouvertures cumulées | Poids de l’email en Mo | Temps de lecture | % lecture sur smartphone | % lecture sur desktop | % lecture sur tablette |
---|---|---|---|---|---|---|---|
EDITORIAL | 120 402 442 | 61% | 1,68 | 0,16 | 15% | 80% | 5% |
MARKETING | 23 133 321 | 55% | 0,866 | 0,16 | 15% | 80% | 5% |
TRANSACTIONNEL | 247 904 | 144,00% | 0,0243 | 0,16 | 15% | 80% | 5% |
TRIGGER | 1 072 373 | 75,24% | 0,0811 | 0,16 | 15% | 80% | 5% |
Total général | 144 856 040 |
La répartition des modes de consultation : 4G, WIFI
Hum… là je n’ai pas l’info du tout. Et personne ne l‘aura jamais. Nous allons demander à SAMI de trouver une étude sur la répartition standard des consultations. (Coucou Alexis et Guillaume !)
Nous sommes donc partis sur des hypothèses proposées par SAMI. Ici, on a une base BtoC, donc 50% en WIFI et 50% en 4G. (Si on avait une base BtoB, la répartition aurait été toute autre).
La localisation des lecteurs
Facile si vous connaissez vos cibles.
Ici nous sommes sur un lectorat 100% français.
Maintenant, le résultat et les conclusions
Après un savant calcul de la part de SAMI (voir plus bas) :
Typologie de campagnes | Émissions data center | Émissions réseaux | Émissions terminaux | Amortissement terminaux | Émissions totales (kg CO2e) | Emissions par email (g CO2e) |
---|---|---|---|---|---|---|
EDITORIAL | 2700 | 2315 | 329 | 3910 | 9253 | 0,08 |
MARKETING | 267 | 229 | 57 | 677 | 1231 | 0,05 |
TRANSACTIONNEL | 0 | 0 | 2 | 19 | 21 | 0,08 |
TRIGGER | 1 | 1 | 4 | 43 | 49 | 0,05 |
TOTAL | 2 969 | 2545 | 391 | 4649 | 10554 | 0,07 |
Résultat : 10,55 tonnes de CO2e pour 144 856 040 emails envoyés en 2022.
Le premier poste d’émission est la part de fabrication des terminaux. D’où l’intérêt de sensibiliser en poussant dans les emails le fait de garder son matériel un maximum de temps.
L’envoi de cet email est responsable de l’émission de 0,08 grammes de CO2.
Proposition de Badsender à Mediapart
Réduire l’empreinte carbone du numérique, c’est avant tout allonger la durée de vie de vos appareils, réparer, acheter en reconditionné ou opter pour la location longue durée.
Le volet “Data center + réseaux” est de 5,5 tonnes de CO2e. En excluant les inactifs de leurs envois, en travaillant sur l’éco-conception de leurs email et sur la rédaction, Mediapart diminuera le nombre d’emails envoyés, le poids des html et le temps de lecture.
Pour info, si nous réduisons le poids des newsletters à 1Mo (vs 1,68Mo actuellement), l’impact carbone global de la stratégie emailing passe de 10,5 tonnes à 8,5 tonnes. Rien que ça, nous ferait gagner 2 tonnes !
Le savant calcul de SAMI
Dans le monde de la compta’ carbone, nous avons l’habitude de découper les émissions des consultations numériques en 4 catégories :
- Les data centers : nous retrouvons dans cette première catégorie les émissions de CO2e générées par l’énergie utilisée pour stocker les données. Pour mesurer ces impacts, nous nous appuyons sur des données de Cisco, en l’occurrence 0,000057kWh/MB. Ensuite, en fonction des quantités de données stockées et du pays de stockage, nous mesurons l’impact des émissions liées à cette première brique.
Le pays de stockage joue un rôle déterminant, stocker ses données en France permet à titre d’exemple de profiter d’une énergie 7 fois moins carbonée qu’en Allemagne (bouuuh le charbon) ! Et 4 fois moins carbonée qu’en Belgique. - Les réseaux : pour ouvrir ces fameux mails, vous devez nécessairement être connecté à un réseau Internet : wifi ou 3,4,5G. Là aussi, c’est l’utilisation de l’énergie sur ces réseaux qui nous intéresse et vous l’avez également compris, le pays dans lequel sont ouverts ces emails joue un rôle déterminant dans l’impact carbone. Autre point, le Wifi engendre une consommation de données 6 fois moins importante que la 4G. Qui dit moins de données transférées, dit moins d’énergie consommée, dit moins d’émissions de CO2e.
- L’utilisation des terminaux : ici encore, lorsque vous ouvrez vos emails, votre ordinateur, votre smartphone ou votre tablette consomme de l’électricité. Plus l’email est long, plus vous allez passer de temps à le lire et plus vous allez consommer d’énergie. Ici aussi, le pays de lecture va influer sur les émissions. Retenons également qu’un ordinateur consomme presque 7 fois plus d’électricité qu’un smartphone par minute de lecture.
- L’amortissement des terminaux : il s’agit du premier poste d’émissions côté numérique lorsqu’on se situe en France et qu’une majorité des consultations ont lieu dans l’hexagone. Nous retrouvons ici les émissions liées à la fabrication des terminaux : un iPhone génère environ 70 kg de CO2e à sa fabrication et un MacBook Pro environ 185 kg CO2e selon Apple.
Ce dernier point n’est absolument pas négligeable. C’est ici que nous pouvons faire beaucoup mieux à l’échelle collective et individuelle pour réduire nos émissions :
- assurer une durée de vie élevée des produits
- permettre leur réparation
- arrêter l’obsolescence programmée
- éco-concevoir le matériel
- allonger la durée de vie de son matériel actuel
- privilégier le matériel reconditionné ou louer votre matériel
A titre d’exemple, l’ordinateur sur lequel vous êtes peut-être en train de lire cet article génère par minute d’utilisation l’équivalent de 0,000201 kg CO2e. Plus l’impact de la construction est faible et plus vous utiliserez votre matériel longtemps, plus cette donnée aura tendance à décroître.
Une fois tous ces calculs réalisés, nous retrouvons les émissions de CO2e globales qu’on peut rapporter au nombre d’emails. De quoi prendre conscience de l’impact de ses usages numériques.
Aller plus loin en prenant en compte l’ombre climatique
À ce stade, il y a vraiment un truc qui me gêne si nous en restons là.
144 millions d’emails envoyés pour mettre en avant des évènements culturels ou de la seconde main ont un impact minime à côté d’une centaine de millions d’emails envoyés pour promouvoir un gros SUV : le premier permettra d’alerter et potentiellement d’engager dans une démarche de réduction, le second provoquera des ventes et sera donc indirectement responsable des émissions de CO2e qui s’en suivront.
Il s’agit en fait de mesurer les conséquences d’une activité. C’est la notion « d’ombre climatique ».
Voici ce qu’il faut prendre en compte comme critères supplémentaires pour mesurer les conséquences de vos envois d’emails.
- Si l’annonceur est dans le secteur des services :
- le CA généré par email en €
- et l’intensité carbone par euro de chiffre d’affaire de l’annonceur (si celui-ci n’a pas fait son bilan carbone, nous pourrons prendre l’intensité carbone du secteur).
- Si l’annonceur est dans le secteur de ventes de produits :
- le nombre de conversions générées par email et par typologie de produit
- et l’ACV (Analyse du Cycle de Vie) par produit
L’analyse du cycle de vie (ACV) est une méthode d’évaluation permettant de réaliser un bilan environnemental d’un produit sur l’ensemble de son cycle de vie. Son but est de connaître et pouvoir comparer les impacts environnementaux d’un système tout au long de son cycle de vie, de l’extraction des matières premières nécessaires à sa fabrication à son traitement en fin de vie (mise en décharge, recyclage…), en passant par ses phases d’usage, d’entretien et de transport.
Mot de la fin
Est-ce vraiment utile de calculer tout ça ? Ça peut paraître un peu lourdingue mais c’est en mesurant qu’on peut se rendre compte de ce qui impacte vraiment votre stratégie et agir en conséquence.
Si nous ne prenons pas en compte l’ombre climatique, les conclusions sont simples : envoyer moins d’emails, baisser le poids des emails et sensibiliser les consommateurs.
Par contre, si nous mesurons l’ombre climatique, nous agissons sur les conséquences de nos messages : privilégier les produits ou services qui ont un ACV bas. Et donc agir sur le business modèle de l’entreprise.
L’enregistrement du live sur le bilan carbone emailing est disponible en audio
N’hésitez pas à vous inscrire à notre podcast « Badsender, Agitateurs d’emails » sur votre plateforme d’écoute préférée.
L’enregistrement du live sur le bilan carbone emailing est disponible en replay
À regarder en basse définition svp !
La retranscription texte du live
Marion Duchatelet – Badsender
Bonjour Alexis.
Alexis Lepage – Sami.eco
Bonjour Marion.
Marion Duchatelet – Badsender
Bonjour à toutes et à tous. Alexis, je suis ravie de faire ce live avec toi, d’autant plus qu’on a réalisé un chouette projet ensemble ces derniers mois, qui est celui de calculer le bilan carbone d’une stratégie emailing, notamment celle de Mediapart. Tu es consultant expert carbone chez Sami. Sami est une plateforme qui permet aux entreprises de calculer leurs bilans carbone, au sens large. On a réalisé ce projet en commun et c’était vraiment chouette. C’est ce qu’on va vous partager aujourd’hui pendant ce live. On a beaucoup trop, à mon sens, parlé d’email ces 12 / 24 derniers mois sur le web et dans la presse. Les communications se sont pas mal multipliées. On a incité les citoyens à supprimer les emails contenus dans leur boîte mail. On a même présenté ça comme un éco-geste utile pour l’environnement. Quand on connaît un peu les ordres de grandeur, on se rend vite compte que ce conseil est assez anecdotique. Ma première question, Alexis, ça va être : est ce que tu peux nous rappeler les ordres de grandeur du canal email ? Peut être même celles du numérique au sens large ?
Alexis Lepage – Sami.eco
Oui, complètement. Et puis peut-être pour rebondir sur ce que tu viens de dire, c’était surtout la ministre de l’environnement, Agnès Pagnier Ruinacher, qui avait cité ce sujet d’éviter d’envoyer des emails un peu rigolos à ses collègues comme un écogeste. Alors, tous les gestes sont effectivement bons, mais c’est important, comme tu le disais, d’avoir des ordres de grandeur en tête et de se dire qu’ à l’échelle d’un individu, envoyer des emails, ça génère au final assez peu d’émissions de CO?. Parce qu’on n’en envoit pas des quantités qui peuvent être aussi monstrueuses que certaines entreprises. Pour avoir un ordre de grandeur, un email, ça va représenter quelques grammes ou microgrammes de CO?, donc c’est assez faible. C’est quand même du CO?, donc c’est important de le garder en tête. Ça génère effectivement des émissions, mais beaucoup moins que d’autres postes. Si on sort un petit peu de l’aspect numérique, on peut se comparer à ses déplacements. À titre d’exemple, un kilomètre parcouru en voiture, c’est 218 grammes de CO?. C’est quasiment 218 grammes de CO? emails, si on se dit qu’ un email égal un gramme. Ça dépend de pas mal de choses, on va le voir juste après. Pour revenir à la thématique du numérique, ce qui est aussi surtout important de comparer, c’est le numérique software versus le hardware. Et ce qu’on constate, c’est que cette partie hardware, donc les écrans, les ordinateurs qu’on a tous devant nous aujourd’hui, c’est surtout eux en France qui vont générer pas mal d’émissions. Un ordi, on a 80% des émissions qui dépendent de sa phase d’extraction des matières et de la fabrication, qui a lieu surtout en Asie, notamment. Et en fait, tout le reste, les 20% restants, ça va être le fret, le retraitement des déchets, ça va être l’utilisation. Mais c’est au final beaucoup plus faible que l’ordinateur en tant que tel. Donc, le bon éco geste, surtout sur la partie numérique, c’est d’arriver à conserver le plus longtemps possible son matériel. Et puis, si on a à changer, d’aller surtout vers du reconditionné et d’essayer de limiter ces changements là le plus possible.
Marion Duchatelet – Badsender
Et à la rigueur, si pour conserver son matériel le plus longtemps possible, je pense au smartphone, on a besoin de supprimer sa boîte mail parce que ça pèse trop lourd. Là, pourquoi pas ? Mais sinon, c’est assez anecdotique, j’imagine. Du coup, on peut se dire qu’est ce qu’ils ont foutu chez Badsender ? Pourquoi ils se sont mis à calculer le bilan carbone d’une stratégie emailing ? Est-ce qu’il n’y a pas quand même un distinguo à faire entre l’email individuel qui vient du citoyen et la stratégie emailing d’une entreprise ? Toi, tu penses quoi de ça ?
Alexis Lepage – Sami.eco
Oui, exactement. Il y a un distinguo à faire entre les deux parce que les quantités d’emails envoyés, ce n’est pas du tout les mêmes. Surtout pour vous, par exemple, Badsender, vous pouvez faire envoyer des millions d’emails et là, on est sur des ordres de grandeur qui peuvent être un peu différents. On peut être en centaines de kilogrammes ou en tonnes de CO?. Donc, on est déjà sur des ordres de grandeurs qui ne sont pas du tout les mêmes qu’à l’échelle d’un individu. Et puis, quand c’est un peu le centre de ton business model, c’est toujours intéressant de calculer l’impact, parce que tant que tu ne calcules pas, tu ne peux pas savoir si c’est un poste très important ou très faible. Et puis, on a surtout tendance à dire, pour la partie bilan carbone, qu’on ne peut réduire que ce qu’on mesure. Et donc là, c’est un peu l’idée de se dire que même si c’est anecdotique, même si ça représente assez peu d’émissions, ça reste le centre de ton business. Et si tu as des leviers d’action qui peuvent te permettre de réduire cet impact là, alors il faut les mettre en place. Parce que chaque tonne compte, chaque kilogramme de CO2 compte. Donc il faut pouvoir garder ça en tête.
Marion Duchatelet – Badsender
Ok. Je vais partager l’écran pour qu’on voit le bilan carbone de Mediapart. Pour être transparente, on a fait un audit classique emailing pour Mediapart, on a audité leur stratégie au sens large. On n’a pas vu dans cet audit uniquement le bilan carbone. Par contre, ça faisait partie de leurs demandes d’évaluer l’impact de leur stratégie. Parce que j’imagine que, comme tu le disais, ça a un poids sur leurs revenus. Donc voilà, savoir chiffrer, savoir mesurer, c’est important. Pour Mediapart, on voit que sur le total 2022, ils ont envoyé 144 millions d’emails par an. Et là dedans, on a pris toutes les typologies de campagnes. Comme on voit sur le tableau, les campagnes éditoriales : ce sont les newsletters qu’elles envoient. Je dis « elles » parce que c’est notamment trois filles chez Mediapart. Il y a une partie campagnes marketing et là, c’est les offres d’abonnement. La partie transactionnelle, c’est les emails de type mot de passe oublié, autour du compte client. Et enfin, la partie Trigger Marketing, ce sont les emails liés aux abonnements numériques. Donc, on a là la totalité du nombre d’emails délivrés sur 2022. C’est ce qui est parvenu dans la boîte mail des destinataires, que ça soit en boîte spam ou en boîte de réception ou en boîte promo, mais en tout cas, c’est ce qui est bien parvenu. Donc, dans les outils de routage, l’indicateur qu’il faut prendre c’est les emails délivrés. On a ensuite pris les ouvertures cumulées. L’ensemble des ouvertures qui ont été émis sur à la livraison de ces emails, même s’ils ont été ouverts deux fois par la même personne, on a pris plutôt le nombre de fois où les emails ont été ouverts. Donc pas les ouvertures distinctes, mais bien les ouvertures cumulées. On a ensuite pris le poids en kilo octet des emails. Donc le poids du fichier HTML + des images + des liens de tracking. Vraiment le poids, une fois qu’il est reçu dans la boîte mail des destinataires. Ça, ça a été une stats un petit peu plus compliqué à sortir parce que dans les outils de routage, on n’a pas un poids moyen des emails par typologie de campagnes. Donc, ce qu’on a fait, c’est qu’on a pris un exemple de newsletter éditoriale, un exemple d’email marketing, un exemple d’email transactionnel et un exemple d’email Trigger. On a calculé le poids de chacun. Donc là, c’est un exemple d’une newsletter de toute l’année 2022, par exemple. On a aussi pris le temps de lecture moyen. Ça, évidemment, on ne l’a pas dans les outils de routage, donc ça a été un peu compliqué. On a pris une mesure qui est à peu près 10 secondes de lecture par email. Ça aussi, c’est plutôt une hypothèse qu’on a pris. On a pris le pourcentage de lecture des ouvertures sur tablettes, mobiles et desktop. Là, on a eu la chance de l’avoir dans l’outil de routage. Et encore, ça ne faisait pas 100 %. Il doit y avoir un bug dans l’outil de routage. Soit ils n’ont pas su dispatché la totalité des ouvertures entre ces trois supports. Car parfois, tu peux ouvrir tes emails via une télé connectée ou autres. J’imagine que c’est ça. Donc, en vrai, j’avais 76% sur desktop, 5% sur mobile et 1% ou 2% sur tablette. Bref, j’ai réajusté. Et il fallait qu’on prenne dans les critères le pourcentage de lecture sur Wifi et de la 4G. Là, pareil, impossible d’avoir ces statistiques. Donc, on s’est mis d’accord sur du 50%-50%. Autre critère, la localisation des serveurs. Donc là, c’était facile. Il suffit de leur demander. Chez Selligent, les serveurs sont en Belgique. Dernier critère, la localisation des serveurs des lecteurs. Et là, on a pris la France à 100% (même si j’imagine qu’il doit y avoir la Belgique et la Suisse). Est-ce que tu peux nous rappeler pourquoi ces critères là sont assez importants ?
Alexis Lepage – Sami.eco
Oui. Alors, tous ces critères, ils vont nous permettre de mesurer l’impact de la campagne sur quatre axes. Le premier axe, c’est plutôt la partie data center, donc le stockage des données. Le second axe c’est les réseaux, avec les fameux réseaux WiFi / 4G. On a un troisième axe sur l’utilisation des terminaux. Quand je vais ouvrir la campagne, forcément mon ordinateur, il va consommer de l’énergie et c’est ce qu’on essaie de retrouver ici. Et puis, le dernier axe, c’est l’amortissement des terminaux, le fait que mon ordinateur va générer une certaine quantité de CO? à sa fabrication. Par exemple, imaginons mon ordinateur, c’est 100 kg de CO? à sa fabrication. Si j’utilise 20% du temps pour la partie emailing, pour consulter, lire des mails qu’on m’envoie, au final, on va imputer 20 kg de CO? à ces campagnes emails. Toutes les informations qui sont dans le tableau, elles nous permettent de classer les émissions dans ces différentes catégories. Et en fait, ce qu’on essaye de chercher pour les trois premières, c’est des quantités d’énergie. Si on regarde les data centers, là, on arrive à retrouver des quantités en kilowatt-heure. Donc un 0,00057 kilowatt-heure par mégaoctet. Donc, plus ta campagne est lourde, plus t’as un stockage qui est important. Donc forcément, plus t’as des émissions associées à cette phase. Et le point qui est également très important, c’est de savoir où est-ce que c’est stocké. Stocker des emails sur un serveur belge, ça n’a pas du tout le même impact que de les stocker sur un serveur français, par exemple. Pourquoi ? Parce que la Belgique utilise beaucoup de gaz pour créer de l’électricité. Et le gaz, c’est naturel, donc c’est une énergie qui est assez carbonée. Beaucoup plus que ce qu’on peut avoir en France, où on a un mix électrique qui est moins carboné que pas mal de pays européens. Donc là, le premier levier d’action, c’est effectivement de se dire comment on peut à la fois jouer sur le poids des emails et comment également tu peux faire en sorte qu’ils soient localisés dans des serveurs situés dans des pays où les mix électriques sont assez peu carbonés.
Marion Duchatelet – Badsender
Donc là, on peut imaginer que pour un marketeur qui veut optimiser ça, il peut se dire « La prochaine fois que je change d’outil, je vérifie où sont localisés les serveurs ». La France, c’est le pays le moins carboné.
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Alexis Lepage – Sami.eco
Un des moins carbonés, effectivement. On a encore mieux. On a les pays nordiques, notamment. La Norvège, où on va utiliser beaucoup d’hydroélectricité. Et là, pour donner un petit ordre de grandeur, un kilowatt-heure d’électricité consommée en Norvège, c’est environ une dizaine de grammes de CO?. En France, c’est environ 60 grammes. En Allemagne, on va être autour de 400 – 500 grammes. Donc là, tu vois, on a des écarts qui sont vraiment différents. Si tu pars en Chine, on va être autour de 800 – 900 grammes par kilowattheure. D’où l’intérêt vraiment que de stocker ces données dans un pays où les mix sont peu carbonés. Et en France, on a quand même la chance d’avoir pas mal de nucléaires et du renouvelable, ce qui nous permet d’avoir un mix qui est peu carboné.
Alexis Lepage – Sami.eco
Et donc par rapport au poids des emails, là, pour le coup, le marketeur est complètement capable de le baisser en allant vers de l’éco-conception. Le temps de lecture, c’est pareil ? Ça dépend aussi beaucoup du pays des lecteurs, pour le coup ?
Alexis Lepage – Sami.eco
Côté temps de lecture, ça, on va plutôt l’utiliser sur la partie utilisation. Par exemple, quand je veux ouvrir mon mail, combien de temps je vais mettre à lire ce mail là ? Et en fonction de ce temps là, on va allouer des émissions à la partie utilisation, à la partie lecture. Si, par exemple, je suis situé en France et que je mets une minute à lire mon email, je vais consommer l’électricité pendant une minute française. C’est ce qu’on va rattacher au bilan carbone. Plus ton temps de lecture, il est long, plus tes émissions, elles ont aussi une chance d’être élevées. Et également, si tu es situé dans un pays très carboné, plus tu vas avoir d’émissions pour cette phase.
Marion Duchatelet – Badsender
Ok. Et la répartition mobile/ tablette/ desktop ?
Alexis Lepage – Sami.eco
Cette répartition là, elle nous sert pour deux choses. À la fois, ce qu’on vient d’évoquer. Mon ordinateur, il va consommer beaucoup plus d’électricité que mon smartphone, par exemple, pour consulter un mail, ce qui est logique parce que l’écran est tout simplement plus grand. Et puis, on va également s’en servir pour la partie amortissement des terminaux. Construire un téléphone, c’est beaucoup moins de matière, beaucoup plus petit qu’un ordinateur, donc beaucoup moins d’émissions de CO?. Donc forcément, consulter un email sur un téléphone, ça va générer moins d’émissions liées à la phase d’amortissement des terminaux, liée à la fabrication de ce matériel.
Marion Duchatelet – Badsender
On a une question d’Olivier qui nous demande « Pour les réseaux, vous prenez en compte également le filaire pour deskop, fibre et Internet ou peu de différence avec le WiFi ?»
Alexis Lepage – Sami.eco
C’est tout l’enjeu d’arriver à prendre des données qui sont à la fois les plus précises possible en fonction de ce qui a été calculé par des scientifiques. Parce que ces calculs là, ils sont menés par des scientifiques. Donc c’est toujours complexe d’avoir des données qui peuvent être très précises. Et puis, c’est ce que tu disais aussi juste avant Marion, c’est que ce n’est pas si simple de récupérer des données qui sont très fiables. Par exemple, sur la partie WiFi / 4G, on a fait une hypothèse de 50 – 50, parce qu’on n’avait pas d’autres chiffres plus précis que ceux là. Là, on pourrait effectivement aller encore plus loin et se dire « Est-ce qu’on peut décomposer réseau 3G, 4G, 5G, aller sur du WiFi, du filaire, etc. » Mais tant qu’on n’a pas d’informations précises, c’est toujours assez risqué et il faut plutôt se contenter des informations qu’on a pour éviter de faire trop d’hypothèses et là, de prendre des scénarios qui seraient un peu complexes à analyser.
Marion Duchatelet – Badsender
Donc là, on a pris 50/50. Mais après réflexion, sachant qu’on avait près de 80% des ouvertures sur desktop et 15 / 20% sur mobile, on aurait pu prendre la même répartition : 80% WiFi et 20% 4G.
Alexis Lepage – Sami.eco
C’est ça. Après, on peut jouer là dessus. Mais, dans tous les cas, on va le voir aussi après avec les résultats, c’est que ce n’est pas forcément le plus gros poste. On va effectivement jouer sur la partie réseau un petit peu, mais on va avoir surtout pas mal d’émissions qui vont être associées plutôt aux terminaux, à l’amortissement des terminaux. Et ce qui va pas mal jouer, c’est est-ce que l’email est plutôt ouvert sur un ordinateur plutôt qu’un téléphone ? C’est là que ça va plutôt ajouter des émissions.
Marion Duchatelet – Badsender
Donc c’est plus ou moins facile de récupérer les infos. Ensuite, la tambouille de Sami, c’est d’arriver à ce tableau-là qui est le bilan carbone de la stratégie emailing de Mediapart. Donc, pour 144 millions d’e mails envoyés sur 2022, ils ont émis à peu près 10 tonnes de CO?.
Alexis Lepage – Sami.eco
C’est ça.
Marion Duchatelet – Badsender
Est ce que tu peux nous expliquer la répartition des émissions data centers, réseaux, terminaux et amortissements des terminaux, même si tu l’as déjà un peu fait, mais avec ce qu’on a sous les yeux.
Alexis Lepage – Sami.eco
Complètement. Déjà, c’est intéressant de voir que 145 presque millions d’emails envoyés, c’est un peu plus de 10 tonnes de CO?. Et 10 tonnes de CO?, c’est quand même le budget carbone d’un Français sur une année actuellement. Donc, ce n’est pas neutre. Il y a un vrai impact derrière une stratégie comme celle-ci. Après, on voit que la première ligne, c’est elle qui va générer la quasi totalité des émissions, donc 9 tonnes sur les 10, parce qu’on a un nombre d’emails envoyés qui est assez colossal. Et en plus, parce que ces emails là, en poids, en kilo octet ils étaient beaucoup plus lourds que les autres. Et puis après, si on regarde un petit peu dans le tableau la répartition des émissions, on voit qu’on a quasiment 3 tonnes sur ces 10 tonnes qui sont liées au data center. Donc là, le premier point pour arriver à décarboner cet aspect là, c’est d’arrêter d’héberger en Belgique, où on a un mix qui est beaucoup plus carboné. Et si, par exemple, ces emails là étaient hébergés en France plutôt qu’en Belgique, on pourrait diviser par cinq, six ces 3 tonnes de CO?. Donc ça aurait aussi un vrai impact ici. Le deuxième point, c’est comme on le disait juste avant, c’est d’arriver à éco concevoir ces emails, pour que le poids soit le plus faible possible. Juste après, on a la partie réseau avec environ 25% des émissions. Donc là, on a le WiFi et la 4G qui vont générer des émissions de CO?, de part les personnes qui vont consulter ça en France. Donc d’arriver à pousser le plus possible les gens à utiliser de la WiFi éventuellement et d’arriver là aussi à avoir des emails qui sont les plus légers possible. Il faut savoir qu’ un réseau 4G, donc consulter une information en 4G, c’est environ six fois plus de consommation d’énergie qu’en WiFi. D’où l’intérêt que de pousser le WiFi. Et puis, c’est ce qu’on disait juste avant, d’arriver à augmenter le nombre de personnes qui vont consulter via un ordinateur, parce qu’il y a plus de chances que ces personnes utilisent un réseau WiFi pour se connecter. Et puis, deux derniers points, on a les émissions des terminaux. Donc là, c’est l’électricité que les ordinateurs, téléphones, tablettes consomment pour consulter l’email. Donc là, on est sur 400 kg de CO?. C’est assez faible, même si ça représente quand même des émissions. Parce qu’on est en France. Si par exemple, on avait 50% des personnes qui consultent les emails en Belgique, on aurait beaucoup plus d’émissions parce que ces personnes utiliseraient de l’énergie belge pour consulter les emails. Et le dernier, c’est le plus gros, presque 50% des émissions : l’amortissement des terminaux. C’est tout ce qu’on évoquait au début, la partie software versus la partie hardware. Ça, c’est la fabrication des ordinateurs, des tablettes, des téléphones qu’on comptabilise en fonction du temps de lecture qu’on a pris juste avant.
Marion Duchatelet – Badsender
Donc, si on fait la moyenne des 10 tonnes divisé par les 145 millions d’emails. Ça veut dire qu’un email envoyé dans cette configuration-là, ça représente à peu près 0,07 grammes de CO2E.
Alexis Lepage – Sami.eco
C’est ça. Exactement.
Alexis Lepage – Sami.eco
C’est marrant parce que dans plein d’articles que tu lis, on parle parfois de 1g de CO2E, parfois de 10 grammes de CO2 par email. On voit donc tous les critères qui font basculer de ce 1 à 10 grammes de CO2. Si on en reste là, en tant que responsable marketing, on peut se dire que la next step, c’est d’éco concevoir ses emails, parce qu’on ne change pas d’outil de routage tous les quatre matins. Donc là, le « pouvoir » du marketeur, ça va être plutôt de jouer sur l’éco-conception. Et aussi, ce qu’on n’a pas encore dit mais ce qu’il faut dire, c’est que moins on envoie des emails, moins on émet de tonnes d’équivalent CO?. Du coup, on peut, on doit aussi jouer sur l’exclusion des inactifs emails.
Alexis Lepage – Sami.eco
C’est ça.
Marion Duchatelet – Badsender
Ce sont les deux axes sur lesquels on a décidé de bosser à la suite de l’audit avec Mediapart. Moi, il y a quand même un truc qui me gêne, le fait de juger les tonnes de CO? qu’émet une stratégie emailing. Parce que Mediapart, pour le coup, peuvent émettre des messages qui vont dans le sens de l’urgence écologique. Mais, un emailing, c’est avant tout un message qu’on envoie. Et à travers ce message, on peut pousser à la consommation ou à la surconsommation. Moi, je crois beaucoup à l’influence du message qui est mis à l’intérieur de l’email. Comme on l’a écrit dans l’article, si on prend le cas extrême dont tout le monde parle en ce moment : Shein. Si Shein envoie des emails, je ne peux pas m’arrêter au nombre de tonnes de CO?E de sa stratégie mailing. Je dois forcément parler des produits que l’entreprise met en avant à l’intérieur de ses emails. Quand je t’ai exposé cette idée, Alexis, tu m’as parlé très vite d’ombre climatique. Est ce que tu peux nous expliquer ce qu’est l’ombre climatique ?
Alexis Lepage – Sami.eco
Oui, complètement. L’ombre climatique, on peut l’expliquer avec un exemple assez simple. On va prendre deux personnes. On va prendre une personne qui est justement directeur marketing d’une grande marque de l’automobile qui fait des gros SUV thermiques. Et cette personne là, individuellement, elle prend très peu l’avion, elle mange assez peu de viande et puis on va dire qu’elle vient en métro au travail chaque jour. Donc son bilan carbone personnel, il va être au final assez faible. Par contre, son ombre climatique, ce que cette personne va générer parce qu’elle va créer au quotidien des contenus qui vont pousser à l’achat de SUV très polluants, son ombre climatique va être assez important. Et on a une seconde personne : un scientifique qui va alerter sur les enjeux climatiques, qui va notamment devoir faire le tour du monde plusieurs fois pour aller parler du sujet, pour aller étudier certains territoires. Son bilan carbone personnel en tant que tel, va être très élevé parce que cette personne prend l’avion très souvent. Par contre, son ombre climatique, elle va être au final assez positive parce que cette personne va sensibiliser des milliers, des dizaines de milliers de personnes. Elle va permettre de faire gagner en connaissance toute la communauté scientifique et plus largement le monde entier. Et donc, peut être que grâce à ses travaux, elle va permettre d’éviter des émissions de CO? dans plein de secteurs. Et donc, même si son bilan carbone personnel est très élevé, au final, les émissions évitées vont être beaucoup plus importantes. Et l’ombre climatique, c’est exactement la même chose. Donc là, le calcul qu’on a fait et que tu montres ici, c’est un peu ce qu’on peut considérer comme l’impact direct. C’est de penser ça un peu sous la forme d’un iceberg. On a les émissions liées à l’envoi de la campagne versus les émissions qui vont être générées par la vente des produits. Et comme tu l’as dit, ce n’est pas du tout la même chose de faire une campagne emailing pour Shein versus une campagne emailing pour Mediapart ou pour WWF, par exemple, où là, tu as un intérêt parce que tu vas sensibiliser le grand public à des enjeux qui sont un peu plus importants que des vêtements.
Marion Duchatelet – Badsender
Donc, l’ombre climatique, c’est le calcul des conséquences de ton activité.
Alexis Lepage – Sami.eco
Exactement, c’est tout à fait ça.
Marion Duchatelet – Badsender
Tu as essayé de calculer l’ombre climatique d’une entreprise de fast fashion, et celui d’une entreprise de low fashion.
Alexis Lepage – Sami.eco
Oui, on a pris un petit exemple pour que ce soit bien clair et qu’on comprenne vraiment où sont situées les émissions. Imaginons demain, on appelle Badsender et on vous dit « Il y a deux clients. Il y a un premier client en fast fashion. C’est une marque internationale. Elle mesure pas trop ses émissions de CO?. C’est pas un sujet qui l’intéresse vraiment. Il n’y a pas vraiment de transparence non plus sur ce sujet là. Et à contrario, tu as aussi une marque de low fashion qui te contacte, qui mesure ses émissions depuis pas mal d’années. Elle met vraiment au centre de son business l’aspect climatique. Elle mesure également l’impact environnemental de chacun de ses produits, pour essayer de faire des produits qui sont les moins carbonés possibles. Et puis, elle a un niveau de transparence qui est très élevé, donc ça va te permettre d’obtenir l’impact carbone des produits que tu vas mettre en avant dans ta campagne emailing, et puis également l’impact carbone de toute la société en tant que telle. Donc là, on va se dire quoi ? On va se dire que super, on décide de travailler avec les deux et on va essayer de comparer un peu les ombres climatiques de chacun. On a dessiné un petit scénario dans lequel on a en première ligne notre marque de fast fashion. Il y a une campagne qui est envoyée et cette campagne, elle est délivrée à 15 millions de personnes. C’est ce que tu disais juste avant, Marion, on va au final envoyer beaucoup moins d’emails côté low fashion. Peut être que tu peux rebondir dessus, c’est plus sur l’aspect essayer de cibler ceux qui vont ouvrir l’email pour éviter d’envoyer un maximum d’emails.
Marion Duchatelet – Badsender
Oui, dans l’hypothèse de départ où on a dit que cette entreprise de low fashion était conscientisée. On s’est dit qu’on allait lui faire envoyer moins d’emails. Tout simplement parce que déjà, la low fashion, je pense qu’actuellement, elle requiert moins de collecte de données. Il y a encore moins de personnes en base et cette entrepise va faire un peu plus attention à son rythme d’envoi, à sa pression commerciale. Dans des boîtes classiques, on est parfois deux emails promotionnels par semaine. Et encore, je peux être gentille, alors qu’en low fashion, on peut être sur une newsletter par mois, par exemple. On n’est pas du tout sur les mêmes ordres de grandeur au niveau du nombre d’emails délivrés. Là, je précise juste qu’on a pris une campagne, mais en vrai, on aurait pu mettre 30 campagnes à 500 000 contacts. Mais, ça aurait été pareil.
Alexis Lepage – Sami.eco
Effectivement, déjà, on va pouvoir jouer sur ce nombre d’emails là, qui est deux fois moins important pour cette marque de low fashion. Ensuite, on a pris l’hypothèse que toutes les deux localisaient leurs serveurs en France. Lea troisième hypothèse, c’est sur le volume moyen de chaque mail. Et là, on voit, comme tu le disais juste avant, ils sont conscientisés, donc ils vont éco concevoir leur campagne, ce qui fait qu’on a un email moyen à 0,3 mégaoctets versus 0,5 pour la marque de Fast Fashion. Par contre, on a un taux d’ouverture cumulé qui va être un peu plus important pour la marque de low fashion. Et là, si aussi tu veux peut être dire un mot sur ça.
Marion Duchatelet – Badsender
On a pris comme hypothèse qu’ en général, les marques de low fashion, elles ont une ligne éditoriale et un ton de voix qui est quand même beaucoup plus marqué, en tout cas qui marque les esprits. Et tout ce qui marque les esprits, c’est beaucoup plus lu et impactant. Donc, on a pris l’hypothèse que l’ouverture cumulée était plus forte dans les campagnes de low fashion et un peu moins forte dans les campagnes de fast fashion. Et au niveau du poids moyen, juste pour revenir dessus, on a pris comme hypothèse qu’ on a plus d’images et moins de texte en fast fashion et peut être plus de texte que d’image dans la low fashion. Dans la fast fashion, on peut encore voir des comptes à rebours. Donc, on va dire un codage plus traditionnel des emails.
Alexis Lepage – Sami.eco
Et donc, à la suite de ça, on a pris quelques hypothèses. C’est ce qu’on vous a montré aussi juste avant. Le temps moyen de consultation, donc 10 secondes. On a ici pris deux tiers d’ouverture en 4G et un tiers en WiFi. On a également pris 50 % des emails ouverts via ordinateur, 45% via smartphone et puis 5%sur tablette. C’est un peu la même tambouille qu’on a montrée juste avant. On va mesurer les émissions de tout ça, donc l’énergie à chaque fois consommée pour chacune des étapes. Et donc, on va retrouver les émissions liées au data center et aux réseaux sociaux. Data center, on voit qu’on est sur des volumes assez faibles d’émissions parce que c’est stocké en France, versus ce qu’on a vu juste avant sur le stockage en Belgique. Les émissions des réseaux, c’est donc 67 et 20 kg de CO?, donc assez modérés. Par contre, ce qui est intéressant de constater, c’est qu’on a un volume moyen de mail qui a été assez travaillé par la seconde marque de low fashion et puis un nombre de mails délivrés qui était aussi plus faible. Et donc là, on va avoir un écart qui est quand même assez important. On était à presque 100 kg de CO? pour la première marque contre 30 pour la deuxième. Donc, on a fois trois entre les deux. D’où l’intérêt que effectivement de mettre en place ces pratiques là. Parce que là aussi, on reste sur un nombre de mails qui est « modéré », mais si on est sur des volumes beaucoup plus importants, des 500 millions, je ne sais pas jusqu’à combien on peut aller, mais forcément, là, l’écart se creuse et on a tout intérêt à éco concevoir et à en envoyer le moins possible. Et puis, les deux dernières briques, les émissions des terminaux, l’électricité consommée par les terminaux et l’amortissement des terminaux, rendant compte la fabrication. Et on voit que ces deux dernières phases, c’est 88% au final des émissions de notre campagne. C’est ce que tu disais aussi juste avant, on a plusieurs leviers, c’est d’envoyer moins de mails, d’envoyer des mails qui sont éco-conçus. Et j’en citerai un troisième, c’est d’arriver à sensibiliser quand même le grand public à l’intérêt de garder son matériel informatique le plus longtemps possible. C’est aujourd’hui le grand enjeu qu’on a autour du numérique. Toutes les marques, iPhone, Samsung, etc, essayent de pousser à la surconsommation de ce matériel là. On a quand même le développement de matériel reconditionné, mais on a un renouvellement qui est encore assez régulier en France de ces modèles là. Vraiment, l’intérêt, c’est aussi d’arriver à sensibiliser.
Marion Duchatelet – Badsender
Hum… quand tu parles de sensibilisation dans une campagne email, c’est de mettre un petit bandeau tout là haut au niveau du header qui dit « Cet email est générateur de quelques grammes de CO2E… Enfin, même pas quelques grammes, dans le cas de Mediapart, c’est 0,07 grammes de CO?. Parfois, ça peut faire un peu bizarre de dire : garder votre téléphone le plus longtemps possible ou passer au reconditionné ou à la location longue durée, ça peut venir un peu comme un cheveu sur la soupe. Alors que juste après, on va parler d’abonnement numérique ou de fringues. Je ne dis pas qu’il ne faut pas le faire. C’est un peu comme dans les pubs classiques. Tu peux avoir le bandeau « La consommation d’alcool est dangereuse, à boire modérément.»
Alexis Lepage – Sami.eco
Après, au final, si tu vois ce message s’afficher à chaque email, peut être que ça va rentrer dans ton cerveau et que tu vas te dire « OK, je vais éviter de changer mon téléphone tous les ans ou tous les deux ans, mais je le ferai tous les cinq ou six ans » parce que ce n’est pas forcément nécessaire de le changer tant qu’il fonctionne très bien.
Marion Duchatelet – Badsender
Et donc l’ombre climatique…
Alexis Lepage – Sami.eco
Exactement. Ça, c’était notre impact direct qu’on a vu juste avant. En termes de volume, on est à quasiment une tonne de CO?. Je crois qu’on était à un petit peu moins d’une tonne. On est à 996, quasiment une tonne de CO?. Ça, c’est notre premier ordre de grandeur. Une tonne, c’est quand même assez conséquent. C’est 50% du budget carbone d’un individu en 2050. Le budget carbone d’un individu sur un an, ce sera deux tonnes, donc c’est déjà bien de pouvoir jouer sur ce chiffre là, mais c’est vraiment important, comme on le disait au début, d’arriver aussi à inclure cette ombre climatique qu’on a présentée juste avant et ce qu’on peut considérer comme de l’impact indirect de la campagne. Pour mesurer ça, on a deux approches possibles. On a soit une approche au chiffre d’affaires, donc d’arriver à savoir ce qu’a généré comme chiffre d’affaires ta campagne. Là, on a fait l’hypothèse pour notre marque de Fast Fashion que 50 000 € de CA ont été générés. Donc, les 15 millions d’emails ont généré 50 000 euros de CA. C’est juste des exemples. Ça nous permet de montrer un petit peu comment est ce qu’on peut calculer cet ombre carbone.
Marion Duchatelet – Badsender
Et encore une fois, juste avant que tu ailles plus loin, on parle des critères. Ce chiffre là, le chiffre d’affaires généré par les campagnes emails, il est de moins en moins facile à collecter depuis la fin des cookies tiers. On a encore du mal à rapprocher ce qu’a réellement généré une campagne email. Et puis après, ça dépend de ton attribution marketing. Est ce que tu considères que c’est l’ email qui a généré ton chiffre d’affaires, alors qu’en même temps, il y a eu des campagnes ads et compagnie ? Encore une fois, on est sur des hypothèses qui sont quand même plus ou moins fiables. Bon après les marketeurs ont quand même une idée de ce que génère leurs campagnes emailing. Sinon, ils n’en feraient pas. Quoique…C’est juste pour mettre un point là dessus. On est jamais au centime près.
Alexis Lepage – Sami.eco
C’est ça. L’idée, c’est juste d’avoir un minima des ordres de grandeur. Et puis après, c’est ce que tu viens de dire, mais est ce qu’au final, si tu vas acheter en magasin, ce n’est pas parce que tu as reçu un email pendant trois mois qui t’a fait penser à la marque et qui, au final, te pousse à acheter ça. Et là, ce serait très difficile d’arriver à déterminer le pourcentage d’attribution de chacun des canaux. Mais donc là, on considère, pour simplifier un peu les choses, que cette campagne là, elle a directement généré 50K € pour notre marque de Fast Fashion. Et donc, ce qu’on va faire, c’est qu’on va multiplier ces 50K € par l’intensité carbone économique de l’entreprise. Alors, qu’est ce que c’est, l’intensité carbone ? C’est le bilan carbone d’une société divisée par son chiffre d’affaires. Et donc ça, ça nous donne une intensité. En l’occurrence, ce qu’on disait au début pour la marque de Fast Fashion, c’est qu’elle n’a jamais fait de bilan carbone. Elle n’est pas du tout intéressée par ce sujet là. Qu’est ce qu’on fait dans ce cas là ? On va chercher un chiffre moyen pour son secteur. Et donc là, on est allé dans une base qu’on a de côté à SAMI, qui s’appelle la base Exiobase, pour le secteur textile. Et on sait que sur ce secteur là, pour générer 1 000 euros de chiffre d’affaires, il faut derrière, générer l’émission d’environ 458 kg de CO?.
Marion Duchatelet – Badsender
Donc, pour avoir 1 000 euros de chiffre d’affaires, ça coûte 450 grammes de CO?, c’est ça ?
Alexis Lepage – Sami.eco
458 kg de CO?. C’est exactement ça. Il faut en fait lier les deux, dire que pour générer 1 000 euros, il faut que tu émettent 458 kg de CO?. Et donc forcément, plus t’as des produits qui sont carbonés, plus t’as une entreprise qui est carbonée, plus tu vas générer de CO? par millier d’euros de chiffre d’affaires. Et donc derrière, on va tout simplement multiplier le chiffre d’affaires de la campagne par ce chiffre et on arrive à 23 tonnes de CO?. Donc 23 tonnes de CO?, c’est ton ombre climatique avec cette première approche.
Marion Duchatelet – Badsender
Alors qu’on était à 618 kg juste en direct, on va dire. Et en fait, derrière, ça cache 23 tonnes.
Alexis Lepage – Sami.eco
Tout à fait. D’où l’intérêt de se poser la question, se dire au final que faire une campagne pour Shein, ça n’a pas du tout le même impact que de faire une campagne pour une autre marque, même si d’un point de vue emailing, on a les mêmes caractéristiques, un nombre de mails envoyés similaires, la localisation des serveurs similaires, etc. Et donc le deuxième calcul qu’on peut faire pour comparer les ombres, c’est de se dire que low fashion, on a généré un chiffre d’affaires sur les 7,5 millions de mails de 40 000 euros. Et donc là, on va multiplier ce chiffre d’affaires là par l’intensité carbone spécifique de l’entreprise. Parce qu’on l’a dit, cette marque de low fashion, elle fait son bilan carbone depuis pas mal d’années. Elle a calculé son intensité et on voit qu’elle est deux fois moins importante que l’intensité moyenne du textile. Pourquoi ? Parce que forcément, elle met en place tout un tas de procédés qui lui permettent de générer moins d’émissions. O n fait le même calcul et on va arriver à 8,8 tonnes de CO?. Donc là aussi, 8,8 tonnes, c’est quand même bien plus important que ce qu’on a généré via la campagne, mais ça reste quand même moins par rapport à ce qu’on a pu avoir côté Fast Fashion.
Alexis Lepage – Sami.eco
Ok. Donc là, c’est en approche chiffre d’affaires et t’as une autre approche produit ?
Marion Duchatelet – Badsender
Exactement. L’approche chiffre d’affaires, elle est intéressante parce qu’elle est globale, elle est au final assez facile à calculer. Si t’arrives à trouver ton CA derrière, tu peux faire le calcul sans aucun souci. Il y a une approche qui est un peu plus complète et qui est aussi hyper intéressante, c’est plutôt une approche produit. C’est de se dire « T’es 50k €, c’est pas la même chose si tu vends des choux ou des carottes. » Donc, au final, tu vas essayer de regarder un petit peu ce qu’on a à l’intérieur. O n a pris un premier exemple avec la marque de Fast Fashion, on a 1 400 tee shirts qui vont être vendus et on sait que l’impact carbone moyen d’un tee shirt, ça, c’est un chiffre qui nous provient de l’ADEME, il est de 5,2 kg de CO?. Tu multiplies l’un avec l’autre et tu arrives à 7,4 kg de CO? les trois tonnes des CO?. Tu vas faire la même chose pour les pantalons et au final, tu arrives à une campagne qui va peser environ 26 tonnes de CO?. Donc, tu restes assez proche de ce que tu as eu en intensité carbone juste avant avec le chiffre d’affaires, mais tu es un peu plus précis.
Marion Duchatelet – Badsender
Et donc là, ça nous permet vraiment d’identifier l’impact des produits qui ont été mis en avant pendant ta campagne. Ok.
Alexis Lepage – Sami.eco
Et donc la conclusion par rapport à tout ça, c’est de se dire que par rapport à l’approche produit qui va un peu plus loin que le chiffre d’affaires, c’est de se dire « Ce type de produit là, si j’ai une trajectoire qui travaille sur la provenance de fabrication, le méthyl, les matières utilisées, etc, je vais avoir mes 23,2 kilos… » Imagine demain, je fais plutôt des pantalons éco conçus, parce que ça marche évidemment pour les fringues. L’idée, c’est de se dire « Je vais avoir… On va peut être imaginer le divisé par deux, donc 10 kg de CO?. C’est de se dire « Il faut que je mette plus en avant mes pantalons é co conçus plutôt que les pantalons classiques. Ça permet de donner une trajectoire éjectoir. Ce que je veux dire, c’est qu’ on reste marketeux, mais ça permet de faire le pont avec le business model de l’entreprise.
Marion Duchatelet – Badsender
Oui, tout à fait. C’est ce qu’on prend dans le deuxième exemple pour la low fashion où on est à 12 kg au lieu des 23, parce que tu as eu de l’éco conception. Le meilleur pantalon, c’est toujours celui qu’on ne vend pas, parce qu’on n’a pas d’émission associée. Maintenant, il faut se dire qu’on aura toujours vraisemblablement des ventes de vêtements. Donc, faire en sorte d’arriver à les limiter et d’arriver dans le même temps, quand on a vraisemblablement besoin d’un pantalon, d’en acheter un qui est éco conçu. Et donc là, forcément, de générer un impact qui est beaucoup moins important. C’est ce qu’on voit pour la marque de low fashion. On a à la fois moins de ventes et en plus des produits qui sont également moins carbonés. Donc on va être sur 8 tonnes de CO? versus les 26 qu’on a juste au dessus.
Marion Duchatelet – Badsender
On a une question de Lina. Pour avoir l’intensité carbone, on doit donc chercher par secteur d’activité combien d’émissions de CO? on a besoin pour générer un chiffre d’affaires dans ce secteur ? C’est comme un facteur d’émission.
Alexis Lepage – Sami.eco
C’est comme un facteur d’émission, effectivement. Et ces calculs là, ils sont déjà faits. On va les retrouver dans différentes bases carbone. Une des plus récentes, c’est la base Exiobase. Celle ci n’est pas publique. Par contre, si vous voulez tenter de faire les calculs, vous pouvez aller créer un compte sur l’ADEME. Il y a une base carbone publique qui est mise à disposition et sur cette base carbone publique, on va retrouver des intensités par secteur. Ça pourrait vous permettre éventuellement d’aller regarder l’intensité carbone du secteur du textile, du secteur des services, du secteur de la construction et essayer de comparer un petit peu ces intensités moyennes là aux intensités de vos clients. C’est là que ça devient intéressant parce qu’on peut se dire « On a plus intérêt à travailler avec telle entreprise qui est plus engagée plutôt qu’avec d’autres qui ont des intensités qui sont très élevés.
Marion Duchatelet – Badsender
Tu aurais le lien de ce que tu as mis en tête ?
Alexis Lepage – Sami.eco
Oui, je pourrais vous envoyer ça. Et pour ceux qui veulent regarder en même temps, c’est base. Empreintes. Adem. Fr. Il faut créer un compte pour accéder aux résultats, mais c’est gratuit et ensuite vous avez accès à tout un ensemble d’informations. C’est des informations qui sont publiques, qui sont malheureusement un petit peu datées. Ça date de 2014, entre 2014 et 2018, donc il y en a certaines qui devraient être mis à jour dans les années à venir. Mais c’est déjà un bon premier point pour avoir des ordres de grandeur.
Marion Duchatelet – Badsender
Et donc là, sur ta dernière slide de présentation, c’est le résumé de l’impact de la campagne plus l’ombre climatique en fonction de ces deux différentes marques Fast Fashion et Low Fashion.
Alexis Lepage – Sami.eco
C’est ça. Et donc sur cette slide là, ce qui est intéressant de comparer, c’est que côté Fast Fashion, on a tout en rouge. On a une campagne qui est plus carbonée parce que moins d’éco conception, plus de mails envoyés. Donc, on va avoir un écart de 240 kg de CO? entre les deux. C’est déjà important de le dire et on l’a dit tout au début : chaque kilogramme de CO? compte, chaque tonne de CO? évitée compte. Donc, si on peut, en tant que directeur marketing ou autre, générer moins d’émissions à la création de sa campagne, il faut absolument le faire. Même si on constate ici avec l’ombre climatique que les ordres de grandeur sont vraiment différents. Parce que si on compare les deux, on voit que pour la marque de fast fashion, elle va être 17 tonnes supérieures à celle de la marque de la low fashion. Donc, tu as un écart, au final, entre ces deux chiffres de 73. Ce qui te montre bien qu’il faut aussi faire en sorte, peu à peu, d’arriver à travailler avec des marques qui sont très engagées. Et c’est toute la difficulté aujourd’hui du secteur marketing de se dire « Est-ce que tu peux promouvoir absolument tout et n’importe quoi ? ». Et au final, c’est forcément un petit peu déconnant de mettre en place plein d’actions sur la campagne en tant que telle pour promouvoir des produits qui sont extrêmement carbonés et où on aura la majeure partie de l’empreinte carbone.
Marion Duchatelet – Badsender
Ok. Ça me fait penser à un guide qu’on a écrit qui est « Quel est le rôle de l’équipe CRM dans la transition écologique ? » Donc là, on voit déjà que le premier niveau, c’est d’éco-coconcevoir ses emails. Ce n’est pas révolutionnaire, mais c’est déjà un petit pas. Je pense aussi à un podcast qu’on a publié où on a interrogé un enseignant-chercheur en communication responsable, qui s’appelle Mathieu Jahnich. Il dit que c’est aussi notre rôle en tant que marketeur d’apporter ce type de sujet au sein du comité de direction pour tenter de changer plus structurellement le business model. On a toujours l’impression que le marketing, la publicité ou la com’ sont des métiers supports. Mais en fait, ils peuvent être moteur pour faire prendre conscience de la nécessité d’une trajectoire descendante. Et c’est notre rôle, en tant que directeur marketing, de porter ces sujets au comité de direction. Je te remercie beaucoup Alexis.
Alexis Lepage – Sami.eco
Merci à toi Marion.
Marion Duchatelet – Badsender
Merci d’être venu expliquer tout ça avec moi. Merci à tous ceux qui ont suivi ce live. Bonne journée à tout le monde.
Alexis Lepage – Sami.eco
Merci beaucoup. Bonne journée à tous.