Nous n’avons pas eu la chance d’en parler jusque là, parce que ça s’est fait juste avant les vacances. À l’occasion de notre AGOA (Assemblée Générale Ordinaire Annuelle), nous avons inscrit une raison d’être dans les statuts de Badsender.
C’est l’aboutissement d’une discussion interne qui a démarrée un an plus tôt. C’est la volonté d’une majorité des collaborateurs de Badsender d’essayer d’avoir un impact positif sur le monde et particulièrement sur la manière de faire du marketing et de la communication.
D’ailleurs, nous ne nous sommes pas limités à la raison d’être lors de cette AG, puisque nous avons aussi embarqué deux nouveaux associés avec Pierre et Olivier. Cela veut dire que nous sommes maintenant 9 associés sur les 12 personnes qui collaborent aux projets de Badsender.
“Badsender accompagne les organisations, qui veulent prendre leurs responsabilités concernant l’urgence écologique et les questions éthiques, pour qu’elles bénéficient du pouvoir d’influence qu’elles méritent. Nous les aidons à aligner leur communication et leur marketing à leurs valeurs, en terme de contenu, d’organisation et de modes de production.“
Pourquoi vouloir une raison d’être dans nos statuts ?
C’est vrai ça, pourquoi une agence emailing devrait avoir une raison d’être ? C’est une agence email… pourquoi aller chercher plus loin ?
Cela fait longtemps que Badsender réfléchi à son impact. Impact environnemental de notre métier, impact éthique, impact social… Depuis quelques années, cela s’est traduit par diverses actions : fresque du climat, bilan carbone, atelier 2 tonnes, guide sur l’accessibilité email, bonnes pratiques sur l’éco-conception email…
Mais cette nécessité d’avoir une raison d’être est arrivée lorsque nous avons commencé à nous interroger sur la typologie des clients que nous servons !
Si nous avons conscience de l’urgence climatique, si nous sommes conscients de l’impact que nous produisons sur la détresse sociale et financière des destinataires … comment devons-nous sélectionner nos clients ? Comment nous assurer que nos clients aient les mêmes ambitions éthiques que nous ?
Nous avons tourné et retourné cette question dans tous les sens, et nous en avons conclu qu’il était trop compliqué d’y répondre, de mettre des critères concrets, sans avoir préalablement redéfini quelle était notre mission en tant qu’entreprise.
C’est dans ce cadre que nous avons décidé de reprendre la question à la base : Quelle est la raison d’être de Badsender ? Au-delà de nous payer un salaire en fin de mois, pourquoi faisons-nous notre métier ? Quelle est la finalité de nos actions ?
Quel processus pour définir notre raison d’être ?
Difficile, voir impossible, de faire cette démarche sans être accompagné ! C’est pourquoi nous avons fait appel à Roxane Julien et Jean-Marie Perbost de La Belle Transition.
Ce processus s’est déroulé en 4 grandes étapes :
1. Deux jours d’atelier pour les 4 membres du Comité Opérationnel de Badsender
Nous nous sommes réunis à Bram, dans l’Aude durant 2 jours afin de réaliser un grand brainstorming avec l’aide de Roxane et Jean-Marie, et de l’approche « Tête Corps Cœur » du Campus de la Transition. Au menu :
- Méthodologie des 6 portes : Qui permet de penser l’impact et l’objectif d’une entreprise de manière plus large (vue systémique, gouvernance, responsabilités, récits, actions, éthique…)
- Les 3 horizons : Qui permet de se projeter dans le futur. Qu’est-ce qui se passe si on ne change rien (Business as usual) ? Quelles sont les ruptures futures qui peuvent se produire dans l’activité de l’entreprise ? Quelles sont les tendances longues qui vont transformer durablement notre activité (futurs émergents) ?
- L’IKIGAI : Comment trouver sa place, en tant qu’entreprise, et en tant qu’individus ? Qu’est-ce que nous aimons faire ? Pour quoi sommes nous doués ? Comment pouvons-nous gagner notre vie ? De quoi le monde a-t-il besoin ?
- L’écriture de la raison d’être : Nous avons commencé à brainstormer sur ce que pouvait être notre raison d’être finale. Ce fut aussi l’occasion de regarder ce que d’autres font. Nous avions néanmoins en tête de finir cette étape avec l’ensemble des salariés et collaborateurs de Badsender.
2. Mise en commun avec l’ensemble des collaborateurs
Lors des deux jours d’atelier, nous avions accouché d’une première raison d’être, avec l’objectif de la casser pour en reconstruire une en commun avec tout le monde.
La raison d’être “temporaire” : Aider à mettre en œuvre un marketing sobre et responsable en accompagnant le développement des organisations ou projets à impact.
Nous avons donc présenté les travaux réalisés avec La Belle Transition, expliqué toutes les étapes, montré les résultats à toute l’équipe, réexpliqué la démarche. Cela a permis de recréer le débat avec tout le monde.
Pour impliquer toute l’équipe, nous avons demandé à chacun un travail autour des mots clefs qui allaient devoir figurer dans cette raison d’être :
Besoin d'aide ?
Lire du contenu ne fait pas tout. Le mieux, c’est d’en parler avec nous.
- Lister les verbes qui expliquent notre action : Accompagner, soutenir, guider, contribuer…
- Lister les mots clefs qui expliquent à qui nous nous adressons : entreprises, associations, organisations, clients, personnes…
- Lister ce qui qualifie ces organisations qui ont un impact social et environnemental positif, qui ont une volonté de changement, qui ont un objectif similaire au nôtre, en phase de changement, qui ont une conscience…
- Lister les mots qui expliquent le “quoi”, ce que l’on fait pour ces organisations : transformer leur communication, changer de vision, stratégie marketing, leurs réflexions, leurs visions, les enjeux sociétaux et environnementaux… (là, nous avons eu beaucoup beaucoup de matière première 😉 ).
Avec cette base, chacun a été invité à faire une proposition de raison d’être, et nous avons réalisé des votes (5 points par personnes à distribuer entre les propositions).
3. Prise de décision
Après la première phase de vote, nous avons isolé les 3 propositions ayant recueillies le plus de votes. Et nous avons organisé un débat afin de les fusionner et d’isoler une proposition finale qui fasse consensus.
Évidemment, dans notre cas, nous ne sommes que 12 personnes dans l’équipe. Cela facilite les discussions. Dans une organisation plus large, il sera sans doute plus difficile d’obtenir un consensus par le débat.
4. Inscription dans les statuts
C’est l’étape la plus simple et efficace du processus. Nous avons donc ajouté cette raison d’être comme préambule dans nos statuts, et voté ceux-ci en assemblée générale.
Décryptage de la raison d’être de Badsender
Notre raison d’être est donc : “Badsender accompagne les organisations, qui veulent prendre leurs responsabilités concernant l’urgence écologique et les questions éthiques, pour qu’elles bénéficient du pouvoir d’influence qu’elles méritent. Nous les aidons à aligner leur communication et leur marketing à leurs valeurs, en terme de contenu, d’organisation et de modes de production.“
Voici quelques mots clefs qu’il est intéressant de décrypter pour bien comprendre l’état d’esprit de cette raison d’être :
- Accompagner : C’est la vocation de Badsender. Accompagner. En faisant à la place de nos clients, ou en les aidant à acquérir de nouvelles compétences.
- Les organisations : Nous ne voulions pas nous limiter au monde de l’entreprise. Le mot organisation permet d’inclure des notions de sociétés, d’associations, d’institutions, de pouvoir publics, d’équipes…
- Prendre leurs responsabilités : Dans ces organisations, nos cibles prioritaires sont celles qui prennent leurs responsabilités.
- Urgence écologiques et questions éthiques : Elles prennent leurs responsabilité, non seulement sur l’urgence écologique, mais aussi sur les questions éthiques. Questions éthiques liées à leurs métiers (vie privée, meilleures pratiques…), mais aussi liées aux questions sociales.
- Aligner : Mettre en phase, rendre cohérent… ces engagements pour qu’ils ne soient pas un discours mais une réalité concrète.
- Contenu, organisation, modes de production : Le marketing et la communication ne sont pas des éléments isolés d’une organisation. Bien au contraire ! Évoluer vers une prise en compte des limites planétaires et des enjeux sociaux requiert un alignement global des organisations.
À quoi cette raison d’être nous engage, et comment suivre son impact ? Quelles sont les prochaines étapes ?
Maintenant que nous avons une raison d’être dans nos statuts, est-ce que l’on peut retourner à nos occupation habituelles ? Pas vraiment.
Cette initiative s’inscrit dans une trajectoire de transformation. Une trajectoire qui ne sera pas simple tant nos métiers du marketing et de la communication sont, par défaut, en opposition avec les besoins de sobriété qu’impliquent la transition écologique.
Nous avons besoin de nous réinventer pour y parvenir. Nous allons devoir casser certains de nos vieux réflexes, et nous n’allons pas y arriver en quelques mois.
Notre raison d’être nous engage : mesurer
Chaque année, toute entreprise valide ses comptes en assemblée générale. De la même manière, nous allons devoir rendre des comptes sur notre raison d’être.
Cela veut dire prouver une évolution positive de notre activité vis-à-vis des critères qui y ont été mis. C’est un travail en cours, mais voici quelques indicateurs de mesure que nous sommes en train de mettre en place :
- Évolution de nos émissions de gaz à effet de serre (voir notre article sur la baisse de l’intensité carbone de Badsender en 2022)
- Évolution de la typologie de nos clients (H1, H2, H3 selon le modèle des trois horizons)
- Évolution de notre chiffre d’affaires par typologie de prestation
- Mesure de notre ombre climatique (là, il y a beaucoup de boulot)
Les gros chantiers auxquels nous allons nous atteler en 2024 et qui sont en droite ligne de cette initiative sur la raison d’être sont principalement de deux ordres :
- Travailler sur notre gouvernance : Comment aligner en permanence nos prises de décisions afin de faire évoluer positivement tous ces indicateurs ? En n’oubliant pas d’inclure un maximum l’ensemble de l’équipe.
- Travailler sur l’évolution de nos prestations : Notre activité actuelle, centrée sur l’emailing et la newsletter, peut difficilement nous permettre d’atteindre nos objectifs à elle seule. C’est pourquoi nous allons devoir nous diversifier afin de toucher les organisations qui nous intéressent et de faire évoluer notre ombre climatique. Un travail de réflexion que nous avons initié lors de notre dernier team building sous forme d’un bilan de compétences collectif.
Conclusion : transformer ou tout casser ?
Il y a une question difficile, mais qu’il est indispensable de poser : Pouvons-nous transformer une organisation sans tout casser et reprendre à zéro ?
D’ailleurs, ce n’est pas vraiment une conclusion, puisque ça ouvre une réflexion abyssale. Après un an d’enregistrement de notre podcast “Sobriété et Marketing”, je suis (malheureusement), en train de me forger la conviction que transformer en profondeur une organisation n’est pas évident… voir impossible.
C’est pourquoi de nombreux entrepreneurs, dans le cadre de la transition écologique, sont de plus en plus axés sur une stratégie de remplacement plutôt que sur une stratégie de transformation. Ils lancent des entreprises pour remplacer les activités moins vertueuses des entreprises traditionnelles.
Clairement, ce sont ces entreprises que nous aimerions accompagner en priorité. Mais est-ce que nous ne devrions pas nous appliquer ce principe à nous même… à méditer.